Le groupe espagnol Vocento connaît le succès grâce à sa rubrique numérique « Vivir »

« Vivir », la rubrique lifestyle et santé de Vocento, a été durement touchée par la pandémie. Mais l’abandon des flux de travail centrés sur le print et l’adoption d’une démarche axée sur le numérique ont permis au groupe de booster le trafic, faisant de cette rubrique un modèle de succès.

Interview de Óscar Beltrán de Otálora, Directeur du Développement Editorial, et Yolanda Veiga, Rédactrice en chef de Vivir.

En février 2020, le groupe de presse espagnol Vocento, qui possède un journal national et 11 titres régionaux, a lancé une nouvelle rubrique axée sur le lifestyle et la santé, appelée « Vivir », qu’il décrit comme « un point de rencontre pour améliorer la vie quotidienne des lecteurs à travers les sujets qui les touchent, les passionnent, les inquiètent et les font vibrer ».

L’équipe en charge de la rubrique est composée de sept personnes, dont cinq travaillent dans la rédaction du journal El Correo à Bilbao et deux dans la rédaction centrale du groupe à Madrid. En février 2020, Vivir a enregistré près de 500 000 pages vues, mais au cours des mois suivants, le trafic a chuté, avec seulement 167 000 pages vues.

« Vivir a été durement touché par les effets de la pandémie », constate Óscar Beltrán de Otálora, Directeur du Développement Editorial de Vocento.

« Nous avons eu un petit pic durant l’été 2020, mais les chiffres sont ensuite redescendus. C’est à ce moment-là que nous avons commencé à appliquer certains des conseils que nous avions reçus dans le cadre du programme Table Stakes Europe. »

Quels sont les changements que vous avez introduits dans Vivir ?

Óscar Beltrán de Otálora : L’un des points clés de Table Stakes que je trouve très intéressant c’est le « Stop doing ». Il n’y avait pas beaucoup de choses que nous pouvions arrêter de faire parce que le contenu de Vivir est publié à la fois sur papier et en ligne. Mais ce que nous avons pu faire, c’est cesser de nous concentrer autant sur le print et faire du numérique une priorité. C’est à ce moment-là que nous avons organisé des réunions de formation pour tous les collaborateurs de la rubrique, nous leur avons appris à utiliser le CMS et à s’impliquer davantage dans le numérique dans leur travail quotidien.

C’est alors que nous avons commencé à obtenir de très bons résultats. La dernière étude que nous avons réalisée avec le responsable de l’analyse data d’El Correo a montré que nous avons triplé notre audience et atteint un million de pages vues. Cela fonctionne à merveille pour nous et nous en sommes très fiers. Je pense que c’est une success story absolue dans notre cas.

Comment le contenu de Vivir s'inscrit-il dans votre stratégie abonnement ?

Óscar Beltrán de Otálora : Lorsque nous avons lancé la section Vivir, tous les journaux ne disposaient pas d’un paywall. Notre premier objectif était donc de récupérer le trafic perdu et d’atteindre une croissance continue. Aujourd’hui, nous préparons une stratégie abonnement car tous les journaux du groupe ont désormais un paywall. Mais nous devons garder à l’esprit que, même si le produit est le même, nous avons des journaux différents avec des comportements utilisateurs différents. Les lecteurs du Pays Basque ne sont pas les mêmes que ceux de Malaga, par exemple.

Ce que vous avez appris et réalisé avec Vivir peut-il servir de modèle pour d'autres rubriques des journaux ?

Óscar Beltrán de Otálora : Je le crois fermement. Nous pouvons mettre en œuvre quelque chose de similaire dans les rubriques qui sont plus axées sur le papier pour le moment. Nous avons une rubrique appelée La Butaca, spécialisée sur le cinéma et la télévision, où nous pourrions appliquer cette méthode. Je pense que le travail de Yolanda est un exemple qui montre comment prendre en main une rubrique qui était très faible en termes de chiffres, tripler ces chiffres et la transformer en une rubrique phare.

Quelles ont été les principales difficultés rencontrées lors de la mise en place d'une approche axée sur l'audience et le numérique ?

Yolanda Veiga : Sur les sept personnes de l’équipe, deux d’entre nous (moi-même et un autre collègue) avions déjà travaillé sur le site web de El Correo, nous étions donc plus conscients de la nécessité de la transformation numérique. Je dirais que le défi a été de faire comprendre à toute l’équipe que l’avenir est dans le numérique. Le print est très important pour nous et nous en prenons grand soin, mais nous devons considérer le numérique comme tout aussi important. Parvenir à cette évolution des mentalités a été un vrai challenge.

Quelles parties de la méthodologie TSE avez-vous appliquées à ce projet ?

Óscar Beltrán de Otálora : Pour moi, la formation est essentielle, et la transparence des données est indispensable. Vous ne pouvez pas réussir la transformation numérique si les collègues n’ont pas toutes les informations pour comprendre ce qui se passe. Il est également important de célébrer les petites victoires. Ce que nous gardons aussi à l’esprit, c’est que cette rubrique montre à quoi ressemble la transformation et que cette idée peut être appliquée à tous les journaux du groupe.

Que vous a apporté le programme TSE sur le plan personnel ?

Yolanda Veiga : Le fait de doubler le nombre de visites en quelques mois en appliquant certains changements, c’était très encourageant. Mais cela m’a également prouvé que c’était faisable. Je le crois parce que je l’ai vu. Lorsque nous parlons de numérique, cela semble toujours moins tangible. Il semble y avoir beaucoup de théorie mais peu de pratique.

Cependant, on nous a dit que nous allions recevoir une formation, que nous allions appliquer les connaissances SEO, que nous allions réfléchir à des titres différents et à de nouvelles façons de présenter le contenu, que nous allions apporter des changements concrets et voir ce qui se passe. Nous avons franchi les étapes et obtenu de bons résultats : on y a cru !

Óscar Beltrán de Otálora : Je suis tout à fait d’accord. Lorsque vous voyez des résultats tangibles, cela vous encourage à travailler davantage. Le programme vous permet de réfléchir à votre travail, à la manière dont vous le faites, aux raisons pour lesquelles vous prenez certaines décisions. Dans la salle de rédaction, vous êtes normalement tellement pris par les tâches quotidiennes que vous n’avez pas le temps ou la motivation de faire une pause et de réfléchir, et là vous réalisez l’importance de réfléchir à ce que vous faites.

Bien que nous n’ayons pas eu de grands débats, les petites conversations que nous avons eues ont été très inspirantes. Table Stakes vous permet de prendre des pauses pour analyser l’ensemble votre travail et c’est toujours une bonne chose.

À son lancement, le flux de travail de Vivir était plus centré sur le print et l’organisation reposait sur les besoins de l’édition papier hebdomadaire. (Image : Vocento)

Le nouveau flux de travail de Vivir axé sur le numérique et sur l’audience a donné un élan à la section et la vitesse d’obtention des résultats a même surpris la rédaction. (Image : Vocento)